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[Episode 9] Les petits mots de la Bergerie des Malassis [5]

    Nous partageons ici les textes de Gilles, de la Bergerie des Malassis, initialement publiés sur la page Facebook de La bergerie des Malassis.


    Les petits mots de la Bergerie des Malassis – (Ça câline ça fait mal)

    Les chèvres pâturent dans une friche, la bergerie des Malassis

    Il faut se mettre de temps en temps la tête sous l’eau froide. Il faut se mettre un bon coup de pied au cul pour ne pas se faire happer par la pensée fast food, par l’écologie prémâchée et inoffensive politiquement, et par les boniments qui finissent par recouvrir les réalités sociales et environnementales.

    A l’heure où un nombre vertigineux d’espèces disparaissent, où le nombre de petits paysans fond comme la banquise, où la terre disparaît de façon drastique de nos villes, à cette époque inquiétante quand à l’action négative de l’homme sur son environnement, on ne nous a jamais autant parlé de nature. De la nature, de l’écologie, de la solidarité, en veux tu en voilà, dans tous les bulletins municipaux, dans les brochures et autres sites d’associations performantes et communicantes et écolos et solidaires bien sûr !

    Alors que les espaces verts publics se réduisent à peau de chagrin, que les insectes disparaissent, que chacun s’enferme dans un écran, qu’il y a de plus en plus de gens qui mendient aux feux rouges avec des enfants dans les bras, que des camps s’érigent à défaut de déclarer que le devoir d’un accueil digne est la seule option moralement soutenable, on propose au citadins naïfs que nous sommes, la messe autour de la nature, de l’agriculture urbaine, du lien social.

    La nature, l’écologie, l’agriculture deviennent des produits de consommation de loisirs comme d’autres l’étaient déjà. On nous a fait le coup de la culture pour tous et maintenant c’est au tour de la nature; pour tous oui, mais après la nature, il n’y a plus rien.

    Comme c’est barré, ça finira pareil; dans quarante ans, seuls les plus riches auront accès à une nature qui ne sera qu’une réserve, un zoo, comparée à ce qu’elle aura été. Les plus pauvres n’auront plus de nature, d’herbe, de terre… si ça continue comme ça. Elle va devenir la denrée rare.

    Alors quand même j’voulais dire que j’étais mort de rire quand je vois comment certains peuvent s’extasier avec plein de raffinement sur la création d’un compost collectif et participer sans sans rendre compte au greenwashing généralisé et aliénant, visant à saturer de messages contradictoires, la réalité.

    Une campagne municipale va débuter, ça risque d’être encore un sacré et désolant spectacle. Ça va être à qui sera le plus écolo, le plus solidaire, le plus citoyen, le plus sympa quoi… De la com, des belles photos, de la mauvaise foi, des promesses, des généralités, tout pour engranger les voix. Mais combien par rapport à toutes celles qui ne s’expriment pas par le vote ?

    Nos villes de banlieue ont changé. On nous fait le show maintenant.
    J’envoie un p’tit message, de collègue à collègues, aux acteurs dynamiques de la nature en ville, de l’agriculture urbaine (je déteste ce terme), du design machun et du lien social : « Avez vous conscience que nos activités servent de rustines au désastre environnemental et philosophique que nous vivons? Si oui, comment réagissez vous à cette situation paradoxale ? »

    En ce qui concerne la Bergerie, nous sommes la ferme des Malassis et nous défendons, avec la population, chaque surface de terre restante, chaque arbre qui vit ici, et le droit aux habitants d’avoir accès à des espaces verts publics de proximité, beaux et plein de vie, comme le mérite ce quartier et ses habitants.

    On ne peut plus aujourd’hui, sans une certaine ambiguïté et sans une certaine complaisance avec les causes des problèmes, se dire asso écolo biencomme-y-faut, et s’approprier une légitimité à définir ce qu’est la nature, sans se positionner clairement face au pouvoir politique sur des enjeux comme la disparition des espèces vivantes et les impacts humanitaires et humains de la crise climatique, sachant que les plus pauvres sont toujours les plus durement touchés. Il faut de la clarté, tant il y a d’enfumage.

    Jardiner, aimer s’occuper des bêtes, être attaché à un arbre, observer les insectes, faire de la confiture, des yaourts, du miel, ça appartient à tout le monde; c’est universel, c’est humain. Il faut que tout ceux qui le veulent puissent le faire, ailleurs que dans des espèces de musée de la nature sympa ou un happening urbain de mes…

    J’suis p’t’être un peu énervé mais ça fait du bien. On peut encore s’exprimer ou quoi M. !

    Il y a tant de choses à dire, à écrire, et nous avons si peu de temps … Les petits mots de la Bergerie diront un peu, souvent, c’est déjà beaucoup.


    Retrouvez d’autres textes de Gilles sur le blog de l’association Sors de Terre.

    Regardez aussi l’épisode de la websérie documentaire SideWays sur la bergerie des Malassis.

    1 commentaire pour “[Episode 9] Les petits mots de la Bergerie des Malassis [5]”

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