Parmi les thématiques qui reviennent régulièrement quand on parle de construire un nouveau monde, il y a celle de l’éducation, ou de la non-éducation, de l’accompagnement de l’enfant de ses apprentissages, de l’école publique, de l’école privée, de l’école à la maison, des injustices sociales qui découlent de tous les choix éducatifs quel qu’ils soient. Bref, c’est une question complexe.
Et si j’ai acquis une certitude par rapport à l’éducation, c’est que c’est un problème global, qui est lié à la façon dont s’organise la société. Car nous penserions l’éducation de manière très différente si nous n’étions pas séparés au quotidien en classe d’âge. Les enfants avec les enfants, les ados avec les ados, les adultes avec les adultes.
Ne plus se séparer au quotidien demande à repenser notre manière de vivre, de travailler, d’éduquer. Donner une place aux enfants dans la vie du quotidien et ne plus les considérer comme des enfants, justement.
Et penser cette séparation en classe d’âge, cela donne à penser à nos vieux et à nos vieilles également. Parce que les vieux et nos vieilles sont aussi séparés des autres. Tant qu’ils peuvent s’occuper tous seuls, tant mieux. Et quand ils ne peuvent plus, ils deviennent « un poids » pour la famille. Il faut aller les voir le week-end, alors qu’on n’a déjà pas assez de temps pour nous.
Et si…
Et si on imaginait un monde où l’on vivrait tous ensemble. Les enfants avec les ados avec les adultes avec les vieux/les vieilles.
On se rendrait peut-être compte que les enfants gagneraient en maturité à vivre avec plus âgés qu’eux, à être inclus dans les tâches quotidiennes, en fonction de leurs envies, de leurs possibles.
Et que les vieux et les vieilles gagneraient en jeunesse à vivre avec plus jeunes, à être inclus dans les tâches quotidiennes, en fonction de leurs envies, de leurs possibles.
Et que les adultes, globalement, gagneraient en jeunesse et en maturité à passer du temps avec les enfants et avec les vieux et les vieilles, pour réaliser les tâches quotidiennes et leurs activités de personnes « actives ».
Et qu’au final, on ne perdrait pas en « productivité » parce que si on compte tous ceux qui s’occupent exclusivement des enfants et tous ceux qui s’occupent exclusivement des vieux et des vieilles, et tout ce qui est mis en place d’un côté comme de l’autre, p’têtre même qu’on gagnerait collectivement en temps de travail.
Et au-delà de cette vision capitaliste de « est-ce que c’est plus cher? », on vivrait sans doute mieux, tous ensemble, plus joyeux, plus solidaires.
Oh, ce ne serait pas facile tous les jours. Parce que les vieux et les vieilles, parfois c’est chiant, les enfants, parfois c’est chiant, et même que les adultes, parfois, c’est chiant !
Bref, c’était une réflexion, comme ça, en passant.
Et c’est cette réflexion qui nous avait amenés à chercher les initiatives qui étaient mises en place pour les vieux et les vieilles. Et bien, elles ne sont pas si nombreuses que cela. Il y a des cantines intergénérationnelles, qui regroupent enfants et vieux/vieilles dans quelques villages. Et puis, il y a la maison des Babayagas à Montreuil. On y avait rencontré Thérèse Clerc.
Cette femme dégageait quelque chose d’énorme. Une énergie, une joie de vivre, une force, une puissance, une passion, une détermination… C’était beau.
C’était au tout début de SideWays. On cherchait des initiatives, et elle nous parlait de la maison qui devait accueillir des vieilles pour vivre ensemble. Avec le temps, elle a pris du recul sur le projet qu’elle a mis en place, elle voyait beaucoup de problématiques, de choses qui ne fonctionnaient pas comme elle l’aurait rêvé. Ça ne nous a pas enthousiasmé pour l’initiative même si cette femme nous a impressionnés.
Alors comme nous cherchions des projets, nous n’avons pas fait d’épisode. A posteriori, j’aurai tellement aimé faire un épisode sur Thérèse Clerc…
Au moment où nous l’avons rencontrée, je ne savais rien d’elle, ni même que son nom était connu dans certains milieux militants, notamment féministes. Thérèse Clerc a une belle histoire, un film a été tourné sur elle et un livre raconte son histoire. Je suis tombé sur ce dernier, un jour, par hasard. C’est une belle histoire, de celles qui donnent envie à notre tour de pousser les murs et d’essayer de déplacer des montagnes.
Ce texte, un petit hommage à cette grande dame.
Les liens pour aller plus loin
Une cantine intergénérationnelle (lien)
La maison des Babayages (lien)
Sur Thérèse Clerc
Fiche Wikipédia (lien)
Le livre : Thérèse Clerc, Antigone aux cheveux blancs, par Danielle Michel-Chich (2007)
« Insoumise à nu », diaporama sonore (lien)
Le film : Les Vies de Thérèse Clerc, lauréat de la Queer Palm au Festival de Cannes
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